Le drapeau européen est un emblème religieux chrétien

, par  John Groleau
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Comment ferez-vous pour inscrire sur le drapeau de l’Union européenne le nombre d’étoiles correspondant au nombre des pays membres ? Rassurez-vous, le drapeau européen ne changera pas. Ce dernier fut initialement le drapeau du Conseil de l’Europe. En 1950, le Belge Paul M.G. Lévy en tant que directeur de l’Information et de la Presse au Conseil de l’Europe, fut chargé de faire aboutir le projet d’un drapeau. Le 8 décembre 1955, le drapeau d’azur avec une couronne de douze étoiles d’or fut adopté par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe qui était composé de quinze membres puis, en juin 1985, par les dix de la Communauté européenne. Quelle est alors la signification symbolique de cet emblème ?

Le 19 janvier 1950, Paul M.G. Lévy écrivit à Jacques Camille Paris, Secrétaire général du Conseil de l’Europe, afin de lui soumettre une proposition d’emblème :

« un drapeau blanc portant une croix verte au centre de laquelle se détache l’écusson de Strasbourg, écusson blanc portant une bande transversale rouge. […] .
La croix a été choisie  :
[…]
2. Pour symboliser la croisée des chemins.
[…]
4. Comme symbole de l’esprit chrétien.
[…]
La couleur verte de la croix a été choisie :
[…]
2. En hommage au Mouvement Européen. […] » [1]

Cette proposition est à mettre en parallèle avec l’article que Paul M.G. Lévy et Paul Martin publièrent dans Saisons d’Alsace [2] dont le contenu fait essentiellement référence à la symbolique de la croix.

Emblème du Mouvement Paneuropéen, Cinquième rencontre Coudenhove-Kalergi, Gstaad le 08/09/07

Le 5 juin 1950, le comte Richard de Coudenhove-Kalergi, acteur majeur [3] de la construction "européenne", soumit la candidature de l’emblème de l’Union parlementaire européenne -ainsi que du Mouvement Paneuropéen- à J.C. Paris. Dans son courrier, il rappelle que « Ce drapeau a été utilisé par le Mouvement Paneuropéen depuis 1923 et fût adopté officiellement par l’Union Paneuropéenne lors de son premier grand Congrès, qui s’est réuni à Vienne en Octobre 1926 ». Il présente « la croix rouge, comme symbole de la charité supranationale » [4].

PanEuropa, manifeste de Richard Nikolaus de Coudenhove-Kalergi

Mais, comme le rappelle Elisabeth du Réau, professeur émérite à Sorbonne nouvelle – Paris III, « Au début d’octobre 1923, paraissait à Vienne un livre intitulé Paneuropa. L’emblème et la devise qui ornaient la première page de couverture étaient la croix rouge et le soleil d’or. L’auteur, Richard de Coudenhove-Kalergi, commentait ainsi la présentation de son ouvrage :

“La croix rouge des croisades du Moyen-Age est le symbole le plus ancien d’une union européenne supranationale. Aujourd’hui elle est l’emblème de l’humanitarisme international. Le soleil figure l’esprit européen dont le rayonnement éclaire le monde entier” » [5]

Pour Anne-Marie Saint-Gille, professeur de littérature et civilisation germaniques à l’Université Lumière-Lyon II, le soleil d’or est à rattacher à « l’hellénisme figuré par l’astre d’Apollon » [6].

Apollon guidant le char du Soleil et précédé d’Aurore, par Guido Reni, réalisé à Rome en 1614

Le 15 octobre 1951, un certain Arsène Heitz travaillant au service du courrier au Conseil de l’Europe, écrivit à Paul M.G. Lévy :

« J’ai l’honneur de vous soumettre un projet de drapeau européen, dont le fond est vert, couleur de l’étendard de Charlemagne, qui lui a été offert par le Pape Léon III, lors du couronnement, le 25 décembre en l’An 800 à Rome.
[…]
La croix rouge représente le sang répandu par les guerriers européens, depuis des siècles. La double croix jaune accompagnant la croix rouge, est l’emblème du monde chrétien, et la couleur du Vatican.
[…]
Un autre projet, représentant le globe et l’Europe, surmonté de la croix des Croisés et l’emblème de Charlemagne, ci-dessous, la devise en latin “Vis-Concordia” (un pour tous, et tous pour un) » [7].

Le 5 janvier 1952, Arsène Heitz envoya un autre courrier de la même facture au secrétariat général du Conseil de l’Europe en rajoutant que « certaines caractéristiques conviendraient particulièrement au drapeau de l’Union Européenne et de l’Armée » et que « Le fait d’autre part de mettre la croix figurant sur les emblèmes scandinaves, à l’étendard de Charlemagne, peut symboliser l’avènement d’une Europe plus complète que celle de l’Empire Carolingien » [8].

Le 17 mai 1952, Coudenhove-Kalergi adressa un courrier à Frans van Cauwelaert, membre de l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe [9]. Ce dernier siégea de 1910 à 1961 à la Chambre des Représentants de Belgique pour le parti catholique et reçut son doctorat en philosophie à l’Université Catholique de Louvain. Quel fut l’objet de ce courrier ?

« Mon cher Président et Ami,

Comme vous savez, l’enquête sur le drapeau européen, organisée par le Conseil de l’Europe, a donné une forte majorité relative au drapeau de la croix rouge sur un soleil d’or sur le fond bleu.

La seule difficulté qui se pose c’est l’opposition des turcs contre le symbole de la croix. Afin de le faire acceptable aux turcs, je proposerais de placer le croissant au coin gauche du drapeau » [10].

Coudenhove-Kalergi envoya une copie de cette lettre à différentes personnalités, en particulier à Paul M.G. Lévy en rajoutant que dans sa pensée « le drapeau de l’Armée Européenne, qui ne contient que des états chrétiens, devrait être sans croissant, tandis que le drapeau des Conseils de l’Europe devrait y ajouter un croissant » [11].

Le courrier de Coudenhove-Kalergi datant du 15 décembre 1954 adressé à Stéphanos Stephanopoulos, président du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, nous apporte des précisions : « Afin de trancher la question du drapeau officiel, le Secrétariat du Conseil de l’Europe a soumis, en 1952, une douzaine de drapeaux différents à une enquête parmi les membres de l’Assemblée. Des 46 réponses positives, vingt trois furent en faveur du drapeau paneuropéen.

Cependant, le drapeau paneuropéen n’a pas été adopté, à la suite d’une intervention turque rejetant tout drapeau portant un emblème religieux » [12].

Comment cette affaire s’est-elle terminée ? La réponse nous est donnée par un certain Pierre Uhlig. Ce dernier est agrégé de l’enseignement secondaire supérieur en sciences économiques [13], fondateur de l’Association des royalistes de Belgique [14] et membre des quakers francophones indépendants [15]. Sur son site [16] consacré au sanctuaire marial de Jasna-Gora en Pologne, nous pouvons lire ce témoignage :

« Au mois 1987, j’ai rencontré par hasard à Lisieux, devant le Carmel, un Monsieur modestement vêtu qui m’a dit : “C’est à moi qu’on a demandé de dessiner le Drapeau de l’Europe. J’ai eu subitement l’idée d’y mettre les douze étoiles de la Médaille Miraculeuse de la rue du Bac [17], sur fond bleu, couleur de la Sainte Vierge. Et mon projet fut adopté à l’unanimité, le 8 décembre 1955, fête de l’Immaculée Conception.”

J’étais tellement pressé ce jour–là que je n’ai même pas songé à prendre le nom et l’adresse de mon interlocuteur. Et les mois ont passé.

J’ai voulu rechercher le dessinateur du Drapeau. Je suis donc allé à Strasbourg au début de janvier 1989 pour essayer de retrouver ce dessinateur. Je suis monté au Bureau de Presse du Conseil de l’Europe, où j’ai été accueilli par 2 secrétaires expérimentées, d’une soixantaine d’années, qui savent tout de fond en comble. Là, le dessinateur du Drapeau est connu comme le loup blanc. Il s’appelle Arsène Heitz. Il habite 24 rue de l’Yser. Je suis allé chez lui. Il était là. Il m’a reconnu.
Il est mort maintenant, mais tant qu’il a vécu, il aimait raconter son exploit : avoir dessiné le Drapeau de l’Europe et en avoir fait le Drapeau de la Sainte Vierge !

Le travail de M. Arsène Heitz a duré 5 ans : de 1950 à 1955. Pourquoi 5 ans ? Parce qu’il y a eu 101 projets. Tout le monde avait son idée : les socialistes, les francs–maçons, les Juifs, les Protestants. M. Heitz lui–même a travaillé sur 20 projets.

En 1950, c’était M. Paul M.G Lévy qui était le premier Directeur au Service de Presse du Conseil de l’Europe. C’est donc lui qui fut chargé de faire aboutir le projet de Drapeau. Cet homme très cultivé ne savait pas dessiner. Mais il connaissait M. Arsène Heitz, homme très simple, employé au service du courrier, mais très artiste pour peindre et dessiner. Tous deux étaient de bons catholiques.

Evidemment, il fallait éviter d’évoquer la signification religieuse des douze étoiles et du fond bleu, en vertu de la sacro–sainte laïcité. Mais les Catholiques ont le droit de connaître le fond des choses.

Les douze étoiles ne correspondaient pas, à ce moment–là, au nombre des nations. Le Parlement Européen était “conçu pour” 12 nations, mais le Drapeau de l’Europe est le drapeau du “Conseil de l’Europe”, et ce Conseil n’a jamais comporté 12 nations : il en a comporté successivement 6,9, puis 15,... et actuellement 32.

Les discussions, réunions, commissions et sous – commissions furent innombrables, pendant plus de 5 ans, de 1949 à 1955. Finalement, c’est le 8 décembre 1955 que le dessin de M. Heitz fut retenu... à l’unanimité !

M. Paul M.G. Lévy avait une réunion de 3 jours, fixée aux 7, 8 et 9 décembre, pour faire adopter tout un ensemble de projets. Tous les documents sont datés du 9 décembre, puisqu’on signe l’ensemble à la fin de la réunion. Mais tout alla si vite et si bien que cette assemblée termina son travail le 8 décembre, jour où furent apposées les signatures particulières. Et en sortant de la salle, le gendre de Paul Claudel poussa du coude M. Lévy en murmurant : “Mais c’est aujourd’hui la fête de la fête de L’immaculée Conception !” Et tous deux ont retrouvé sans le vouloir le fameux introït du 15 août : “Un signe grandiose est apparu dans le ciel, une femme revêtue du soleil, la lune sous ses pieds, et sur sa tête une couronne de 12 étoiles.” (Apocalypse XII, 1). Arsène Heitz, lui, homme simple, parlait des 12 étoiles de la Médaille Miraculeuse. M. Lévy, professeur d’économie politique, parlait du chapitre12 de l’Apocalypse.

M. Lévy était secrètement d’accord pour faire aboutir discrètement le projet de M. Heitz en sauvant les apparences, afin de respecter la neutralité la plus absolue. Et malgré plus de 100 projets qui furent en concurrence, c’est le Drapeau de la Sainte Vierge qui triompha au dernier moment. Et ce triomphe se produisit fortuitement le 8 décembre, sans que personne ait pu chercher cette divine coïncidence.

Le Drapeau de l’Europe est bien le Drapeau de Notre–Dame, Reine de la Paix !

Pierre CAILLON


Centre St Jean


61500 Sées (Orne)


Texte écrit en août 1995, à la demande et avec la collaboration de Ch. SAUTEUR, aumônier de l’Hôpital, 71250 Cluny, et imprimé par ses soins. »

Le fait qu’Arsène Heitz soit le dessinateur du drapeau européen se retrouve sur une carte postale du Conseil de l’Europe [18] célébrant en 1975 le vingtième anniversaire du drapeau bleu aux douze étoiles d’or.

Carte postale du Conseil de l’Europe célébrant en 1975 le vingtième anniversaire du drapeau bleu aux douze étoiles d’or
Légende : M. Arsène Heitz, ancien agent du Conseil de l’Europe, co-auteur et dessinateur de la maquette du Drapeau de l’Europe


Paul M.G. Lévy est aujourd’hui décédé. En 1968, il fut nommé professeur à l’Université Catholique de Louvain et en 2000, il fut anobli au titre de baron par le roi Albert II [19]. Sur la création du drapeau européen, ce dernier a laissé un témoignage [20] concernant sa signification symbolique en ayant soigneusement omis de dire le principal.

Par un courrier datant du 12 février 1959 adressé à Paul M.G. Lévy [21], Robert Schuman, l’un des "pères" fondateurs de la construction "européenne" qui est sur la voie de la béatification [22], se rallia au choix de l’emblème européen officiel. Ce dernier travaillant pour l’Empire américain [23], s’était peut-être rappelé que cet emblème a quelques similitudes avec le drapeau américain de 1777…

Le drapeau américain en 1776&1777
En 1777, les treize étoiles figurant les treize colonies remplacèrent la croix de Saint Georges et de Saint André qui symbolisait le lien avec l’Angleterre


Ce n’était sans doute pas pour déplaire au comte Richard Nikolaus de Coudenhove-Kalergi qui, le 18 mai 1950, en recevant le prix Charlemagne [24], envisageait déjà dans son discours l’Union atlantique [25].

En tout cas, nous savions déjà que les institutions européennes ne sont pas fondées sur la laïcité, à l’image de la visite de Jerzy Buzek, président du Parlement européen, à Benoît XVI et au Grand maître de l’Ordre de Malte en février dernier [26].

En France, le drapeau anti-laïque de l’Union européenne est aujourd’hui omniprésent dans ce qui relève de l’État. Ne sommes-nous pas devant une violation caractérisée de la loi de 1905 ?

Nonidi 19 Floréal an CCXIX

P.S. : à l’exception du document pdf concernant Robert Schuman et sa béatification, les autres documents pdf en pièces-jointes ont été récupérés sur le site du Conseil de l’Europe le 27/04/11 à l’adresse suivante : http://www.coe.int/t/dgal/dit/ilcd/Fonds/Themes/Flags/Default_en.asp. Malheureusement, aujourd’hui en écrivant cet article, j’ai constaté que le lien n’était plus valable...

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