Combattre le tout-anglais et rester dans l’UE, est-ce compatible ?
Sans même consulter le « parlement » européen, le nouveau Parquet européen vient de décider que sa seule langue de travail serait l’anglais.
Décision d’autant plus scandaleuse qu’avec le Brexit, aucun État membre de l’UE n’a officiellement désigné l’anglais comme sa langue de référence auprès des institutions européennes (l’Irlande a désigné le gaélique et Malte a signalé le maltais).
Comment faire confiance en outre à des « juristes » qui piétinent de la sorte l’esprit des traités européens, lesquels exigent que l’UE respecte la « personnalité » et la « culture » des États-membres ? Si la langue ne fait plus partie de la « culture » et de la « personnalité » des nations, il faut rayer le mot personnalité du dictionnaire...
Mais la réalité est plus grave encore : la nouvelle présidente de la Commission de Bruxelles, Ursula von den Leyen, tente d’imposer l’anglais comme seule langue de travail, voire d’expression publique, de ladite commission. Faute peut-être, de pouvoir imposer l’allemand pour d’évidentes raisons politico-historiques, elle voudrait aussi en faire la seule langue de travail de l’UE en général. Il va de soi que cette officialisation de l’anglais porterait à terme un coup fatal aux langues nationales : elle serait un signal décisif, notamment pour le basculement définitif des grandes entreprises européennes au tout-anglais et, très rapidement, elle aboutirait à faire de l’anglais la langue « co-officielle » (ou la « langue auxiliaire », comme en Irlande où l’anglais a fini par couler le gaélique dans la vie courante) de chaque pays. En violation, s’agissant de la France, de l’article II de la Constitution qui dispose que « la langue de la République est le français ». Il est vrai que, dans la pratique, et avec la totale complicité de Macron et de ses prédécesseurs maastrichtiens et atlantistes échevelés Sarkozy et Hollande, le tout-anglais s’impose de plus en plus ILLÉGALEMENT dans les modes de fonctionnement de l’Université et des grandes entreprises comme Renault ou PSA. Pour autant, l’officialisation n’a rien d’anodin car elle donnerait le signal de l’HALLALI contre notre langue déjà gravement malmenée, mais aussi contre l’italien, le portugais, l’espagnol, l’allemand, etc., bref contre toute la diversité culturelle dont se prévaut hypocritement l’Union européenne.
Il faut donc à la fois dénoncer cette marche funeste vers l’uniformisation linguistique du continent, vers l’américanisation galopante de la planète, vers la langue unique mondiale fauteuse de pensée unique planétaire.
C’est pourquoi d’ailleurs le Haut Conseil de la Langue Française animé par Albert Salon, président d’honneur de l’association Avenir de la langue française, et soutenu notamment par notre ami Matthieu Varnier (secrétaire général de CO.U.R.R.I.E.L.), a écrit au président de la République française pour le presser de stopper cette officialisation intolérable du tout-anglais qui, à terme, menacera gravement le français en France et dans tout l’espace francophone. Comme d’ordinaire, le chef de l’État fait montre jusqu’ici d’un silence que l’on ne peut qualifier que de complice : et pour cause, il est lui-même un héraut permanent du globish en France et à l’étranger...
Et pourquoi pas se poser la question, si l’UE est incapable de faire autre chose que détruire notre langue après avoir gravement affaibli notre souveraineté, notre industrie, notre agriculture, notre protection sociale et nos services publics que d’en sortir au nom des valeurs progressistes et internationalistes dont se réclame COURRIEL (https://courriel-languefrancaise.com/).
Quant à ceux, lisant le présent texte, nous accuseraient d’être des « anti-Européens » primaires, nous leur conseillerons de méditer plutôt la belle formule internationaliste d’Umberto Eco :
« La langue de l’Europe, c’est la traduction ».
« Le nouveau Parquet européen parlera English only (Extrait de Libération) Par Jean Quatremer, correspondant à Bruxelles (UE) — 5 octobre 2020 L’institution a décidé d’utiliser l’anglais comme langue de travail alors qu’aucun des 22 États membres y participant n’est anglophone. C’est une décision étonnante pour la première institution communautaire créée après le Brexit : le Parquet européen, qui va entrer en fonction en novembre, vient de décider de travailler uniquement en anglais. Ou plutôt en globish, cette version abâtardie de l’anglais, d’autant plus que le seul pays anglophone de l’Union, l’Irlande, ne participe pas à cette “coopération renforcée” entre 22 États membres (le Danemark, la Pologne, la Hongrie et la Suède restent aussi en dehors, ce dernier pays venant d’annoncer qu’elle allait y participer). “C’est vraiment un coup dur, d’autant que la procureure européenne, l’ancienne procureure générale de Roumanie Laura Codruta Kövesi, a été nommée en octobre 2019 avec l’appui de la France” [1], commente amer un diplomate français. “Lunaire” Cette décision a été votée par une très large majorité du collège des 22 procureurs européens, un par État participant, qui assistent la procureure en chef. “À vrai dire, il était clair, sauf dans l’esprit des Français, qu’il fallait une langue unique pour travailler efficacement, explique un eurocrate. Et l’anglais est toujours l’une des langues de l’Union selon le règlement 1-58.” “Cela paraît lunaire alors qu’il n’y a aucun parquetier qui soit un "native english speaker", mais il faut comprendre que ce sont des gens de terrain et non des diplomates. Il est donc rare qu’ils parlent autre chose comme langue étrangère que l’anglais”, souligne un diplomate européen. » |