Big business avec Hitler

, par  J.G.
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Quatrième de couverture :

Hitler a comblé les attentes qu’industriels et banquiers avaient placées en lui. En effet, il réalisa tous les points importants de leur « programme » plus diligemment, plus complètement et plus impitoyablement qu’ils n’auraient pu ou osé le faire eux-mêmes.
En outre, à l’issue de douze années d’une dictature nazie dont ils avaient pourtant été les parrains, banquiers et industriels rejetteraient tous les crimes sur le dos d’Hitler et plaideraient pieusement « non coupables ».
Ce livre d’histoire bien documenté est de ceux dont l’élite économique ne souhaite pas entendre parler.

Livre de Jacques R. Pauwels, éditions Aden, Bruxelles, février 2013, 381 pages, 20 euros. Traduit du néerlandais avec la collaboration de Frank Degrez.

Jacques R. Pauwels (né en Belgique en 1946) est diplômé en histoire et en sciences politiques des universités de Gand et de Torento, où il s’est établi et a enseigné. Spécialiste de l’histoire du Troisième Reich, il a publié de nombreuses études sur le sujet. Le mythe de la « bonne guerre », les États-Unis et la Deuxième Guerre mondiale, son précédent ouvrage publié aux éditions Aden, a été actualisé en 2011.


Le 30 juillet 1938, Henry Ford, à l’occasion de son 75ème anniversaire, recevant la Grand-Croix de l’Aigle allemand, la plus haute distinction nazie donnée à un étranger. Karl Kapp, consul allemand à Cleveland, lui remet le prix, tandis que Fritz Heiler, consul allemand à Détroit, serre la main d’Henry Ford.


Le 30 juillet 1938, Henry Ford, à l’occasion de son 75ème anniversaire, recevant la Grand-Croix de l’Aigle allemand, la plus haute distinction nazie donnée à un étranger. Karl Kapp, consul allemand à Cleveland, lui remet le prix, tandis que Fritz Heiler, consul allemand à Détroit, serre la main d’Henry Ford.


Le 1er juillet 1937 à Berlin, lors du congrès de la Chambre de Commerce Internationale (ICC), Thomas Watson - président d’IBM et d’ICC - a reçu des mains d’Hjalmar Schacht - président de la Reichsbank et ministre de l’Économie du Troisième Reich - l’Ordre du Mérite de l’Aigle allemand.

Le 1er juillet 1937 à Berlin, lors du congrès de la Chambre de Commerce Internationale (ICC), Thomas Watson - président d’IBM et d’ICC - a reçu des mains d’Hjalmar Schacht - président de la Reichsbank et ministre de l’Économie du Troisième Reich - l’Ordre du Mérite de l’Aigle allemand.


Ci-dessus, de gauche à droite : Hjalmar Schacht, Fentener van Vlissingen - ancien président d’ICC -, Thomas Watson, Abraham Frowein - industriel allemand -, Pierre Vasseur - secrétaire général d’ICC -.
Source de l’image : Archives nationales numériques de Pologne http://www.audiovis.nac.gov.pl/
Signalons que Pierre Vasseur était un membre de la « société secrète fasciste appelée France 1950 (ou F. 1950) » [1] et fait partie de la liste des 364 synarques de 1943.

Le 1er juillet 1937 à Berlin, lors du congrès de la Chambre de Commerce Internationale (ICC), Thomas Watson - président d’IBM et d’ICC - a reçu des mains d’Hjalmar Schacht - président de la Reichsbank et ministre de l’Économie du Troisième Reich - l’Ordre du Mérite de l’Aigle allemand.


Thomas Watson recevant sa décoration des mains d’Hjalmar Schacht.
Source de l’image : http://www.gettyimages.fr/

Le 1er juillet 1937 à Berlin, lors du congrès de la Chambre de Commerce Internationale (ICC), Thomas Watson - président d’IBM et d’ICC - a reçu des mains d’Hjalmar Schacht - président de la Reichsbank et ministre de l’Économie du Troisième Reich - l’Ordre du Mérite de l’Aigle allemand.


Fentener van Vlissingen et Thomas Watson ayant reçu leur décoration des mains d’Hjalmar Schacht.
Source de l’image : http://www.gettyimages.fr/

À Berlin, Chancellerie du Reich, le 12 juillet 1937 lors du neuvième congrès de l’ICC, Thomas Watson (deuxième à partir de la gauche) avec Hitler et des membres du conseil d’administration de l’ICC.


À Berlin, Chancellerie du Reich, le 12 juillet 1937 lors du neuvième congrès de l’ICC, Thomas Watson (deuxième à partir de la gauche) avec Hitler et des membres du conseil d’administration de l’ICC.
Cette photo d’Associated Press a été reprise par le USA Today dans l’article de Michelle Kessler intitulé « Book links IBM to Holocaust » du 12 février 2001 :
http://usatoday30.usatoday.com/tech/news/2001-02-12-ibm-nazis.htm


Ci-dessous, deux extraits du livre de Jacques R. Pauwels :

« En effet, les grandes entreprises américaines pouvaient faire appel aux services expérimentés des sections parisiennes de certaines banques américaines comme la Guaranty Trust, la Chase Manhattan de Rockefeller et la banque Morgan et Compagnie de J.P. Morgan.
À l’époque de Pearl Harbor, la Chase Manhattan, connue à l’origine sous le nom de Chase National Bank, était l’institution la plus riche et la plus puissante des États-Unis. Elle faisait partie de l’empire des Rockefeller, tout comme la Standard Oil, partenaire américaine d’IG Farben, et, à l’instar de la Standard Oil, elle entretenait d’excellentes relations avec des membres de l’élite industrielle, financière et politique de l’Allemagne nazie. Cela explique en partie pourquoi, sous l’occupation allemande, sa filiale parisienne restait “open for business”, c’est-à-dire continuait à faire des affaires, apportant ainsi sa contribution, et ce tout au long de la guerre, à “la mise à l’abri des avoirs américains en Europe occidentale occupée”. Soit dit en passant : l’ambassadeur d’Allemagne en France, Otto Abetz, avait un compte personnel à la Chase Manhattan. Avant l’entrée en guerre des États-Unis, la Chase avait gagné beaucoup d’argent en faisant des affaires avec l’Allemagne nazie aux USA mêmes. Elle y vendait des reichsmarks en échange de dollars à des immigrants allemands retournant dans une patrie qui, sous la direction d’Hitler, leur semblait désormais en route vers un avenir prospère et glorieux. Pendant la guerre, et même après l’entrée en guerre des USA, la Chase ne fut pas la seule banque américaine à continuer ses activités à Paris. La Morgan et Compagnie y resta également ouverte, réalisant un “petit bénéfice” ; le maréchal Pétain était un de ses clients. De ces banques, et des grandes entreprises étatsuniennes actives en France sous l’Occupation, l’historien Dietrich Eichholtz a écrit que “jusqu’au moment de la libération, leur silencieuse collaboration avec les Allemands fut splendide”. » p. 290 et 291.
« Même avec ses poches pleines de l’argent qu’il avait extorqué aux juifs allemands, Hitler disposait encore de capitaux insuffisants pour payer ses achats martiaux au comptant. Il dut contracter d’énormes emprunts, y compris à l’étranger. À ce propos, les services de Hjalmar Schacht furent très utiles aux nazis, car Schacht entretenait d’excellentes relations avec des financiers internationaux, en Suisse et aux États-Unis notamment. Hitler le nomma d’ailleurs ministre des Affaires économiques et “plénipotentiaire de l’économie de guerre”. Le grand mérite de Shacht, selon le point de vue d’Hitler, était double : d’un côté, il parvint à libérer à l’étranger - à maints égards, de façon trompeuse - les crédits colossaux nécessaires pour le réarmement de l’Allemagne et, de l’autre côté, il fit en sorte d’exempter l’Allemagne du paiement des réparations et ce, pour une durée indéterminée. Le Plan de quatre ans lancé en 1936 impliquait une hausse inédite des dépenses militaires et celles-ci durent être financées avec un programme de déficit budgétaire d’une ampleur encore supérieure à ce que Schacht était disposé à prendre sous sa responsabilité. Schacht n’avait rien contre le programme d’armement d’Hitler, et rien non plus contre la guerre à laquelle menait logiquement ce programme, mais il était partisan d’une forme plus ou moins conventionnelle de financement. Aussi, en 1937, reçut-il une médaille d’honneur, et céda-t-il sa place à des hommes plus aventureux. L’État nazi emprunta alors sans compter, pour financer non seulement la construction massive d’avions, de chars et de canons, mais également des projets ambitieux comme la production de carburants synthétiques - à base de houille et de lignite - dans les usines d’IG Farben. Cette “conjoncture du carburant” dans l’économie allemande rapporta d’énormes bénéfices aux entreprises privées comme IG Farben, mais fit grimper de façon encore jamais vue la dette de l’État. Entre 1933 et 1936, celle-ci était déjà passée de 2,95 à 12 milliards de RM ; ensuite, elle grimpa encore plus rapidement : à 14,3 milliards de RM en 1937, 18 milliards en 1938 et 30,8 milliards en 1939. Pendant la guerre, des sommets vertigineux allaient être atteints : 52 milliards de RM en 1940, 89 milliards en 1941 et 142 milliards en 1942.
L’État nazi emprunta les fonds requis pour le Plan de quatre ans auprès des grandes banques, en particulier la Dresdner Bank et la Deutsche Bank. Les crédits alloués par la Deutsche Bank seuls passèrent de 223 millions de RM en 1936 à 434 millions en 1939. Les banques n’étaient pas des entreprises d’État, mais des institutions privées et elles engrangeaient d’énormes bénéfices, sous la forme d’intérêts élevés sur l’argent prêté à l’État nazi. En outre, elles touchaient également des commissions en fournissant aux citoyens des bons de caisse pour le compte de l’État. Les obligations d’État étaient, elles, achetées à 90 % par les banques mêmes, les compagnies d’assurances et les grandes entreprises, en d’autres termes, par les grands capitalistes.
Dans ces conditions, il n’est pas correct de prétendre, comme le font les historiens américains Henry Ashby Turner, Peter Hayes et les autres apologistes du big business allemand, que l’État nazi dominait les capitalistes allemands, qu’Hitler imposait sa volonté à Krupp et consorts, de sorte qu’ils étaient obligés, bon gré mal gré, de faire ce qu’il désirait d’eux. Si cela avait été le cas, l’État nazi ne serait pas venu frapper affablement aux portes des grandes banques pour contracter des emprunts à gros intérêts. Ce n’était pas l’État nazi qui dominait les grandes banques et entreprises allemandes, mais les grandes banques et entreprises allemandes qui dominaient l’État nazi. » p. 90 à 93

[1« France 1950 » fut fondée en mars 1937 notamment par Francis Hekking, alors secrétaire permanent du COST - Centre d’organisation scientifique du travail - de Jean Coutrot au ministère de l’Économie nationale (Spinasse). L’un des buts de F. 1950 était de permettre des affiliations à la Synarchie. F. 1950 était subdivisée en huit équipes. Dans un tableau du 17 avril 1937, Pierre Vasseur, présent dans l’équipe VIII. Act. ext. Fr., était désigné comme le membre faisant partie du comité exécutif du groupement. Voir Annie Lacroix-Riz, Le Choix de la défaite, Armand Colin, Paris, 2010, p. 252 et 253.

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