L’Attali pas très nouveau est arrivé

, par  André Bellon
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Le voilà, il est là, éclairant le monde de sa pensée lumineuse. Après nous avoir proposé modestement « une brève histoire de l’avenir », s’être adonné à dresser le portrait de Gandhi, Blaise Pascal et Barbara (de simples miroirs pour lui sans doute), nous avoir prédit la ruine « dans 10 ans » (c’était en 2008), s’être lancé dans le développement personnel (« Devenir soi »), Jacques Attali veut désormais nous prémunir des dangers qui nous guette par de menus conseils.

Son dernier livre « Comment nous protéger des prochaines crises ? » lui permet de déclarer que « Faute d’un État de droit global, on assiste à la victoire des plus riches dans l’illégalité. J’ai parlé très tôt d’une “somalisation”, en référence à une situation paradigmatique de marché sans État, de mondialisation sauvage ».

Ce qui est extraordinaire avec Attali, c’est que la complaisance des médias lui permet d’énoncer des énormités – parfois contradictoires d’une année à l’autre – sans contestations. Depuis l’origine du concept de mondialisation dont il a toujours été un des plus farouches partisans, il nous répète la même antienne. Pour résumer son prêche en quelques mots : « La mondialisation est une bonne chose, il faut simplement la moraliser ». C’est pourquoi il larmoie sur « la victoire des plus riches dans l’illégalité » alors que toute son action, lorsqu’il exerçait ses fonctions à l’Élysée était de favoriser au maximum l’emprise des constructions mondialisées au détriment des souverainetés populaires qu’il déteste. N’a-t-il pas encouragé, en tant que conseiller de François Mitterrand puis président de la BERD, les traités les plus libéraux de la construction européenne ou l’instauration de la libre circulation des capitaux ? Ce prêchi-prêcha pétri de bonne conscience n’est pas propre à Attali. Toutes les constructions tendant à la mondialisation sont bâties sur le même scénario : Acte1, Acceptez le pouvoir mondial et dans un deuxième temps, ce sera moral et social ; sauf qu’il n’y a jamais d’acte 2 car justement l’acte 1 empêche toute évolution morale ou sociale.

Il n’y a qu’un mondialisme connu, celui construit par le capitalisme à son niveau actuel de développement. Avant toute quête d’un monde différent, il importe de refuser clairement ce processus, ses présupposés, les forces qui le construisent et le dominent. Le développement de la mondialisation s’est fait, en effet, sur l’idée même de domination des plus riches. Les scandales de 2001 (Enron, Parmalat, …) ont donné lieu aux mêmes larmoiements attaliens du type « plus jamais ça » et à des réformes qui, loin d’atténuer les conséquences, renforçaient les causes, par exemple de nouvelles normes comptables encore plus génératrices de crises et d’inégalités.

Attali ferait rire lorsqu’il parle d’État mondial démocratique. Notons au passage qu’il confond volontairement démocratie et État de droit, ce dernier étant pour l’essentiel la définition de normes qui s’opposent à la volonté populaire. Ainsi, pour prendre un exemple simple, un comité de droits de l’Homme des nations-unies vient-il de condamner la France parce qu’elle interdisait la Burka sur son territoire. État de droit, quand tu nous tiens !

Attali ne mérite sans doute pas qu’on le relègue au magasin des accessoires. Mais, puisqu’il prétend souhaiter la démocratie, pourrait-on cesser de lui offrir de complaisantes tribunes et des sièges dorés sans que personne n’ait le droit de contester sa parole souveraine.

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