Les riches "citoyens" Français de plus en plus nombreux en Suisse
Hier, dans l’article La fortune des 300 plus riches de Suisse atteint 449 milliards [1], La Tribune de Genève a évoqué le fait que « l’attrait de la Suisse sur les détenteurs français de grosses fortunes ne se dément pas. Selon les renseignements réunis par -le magazine suisse- Bilan, il aurait même tendance à se renforcer face à un fisc qui a clairement montré les crocs durant l’année écoulée.
En tête de liste de ces Français de Suisse figurent la famille Wertheimer (Chanel) avec une fortune estimée entre 4 et 5 milliards de francs, la famille Castel (vins, eaux, bière) avec 3 à 4 milliards, les familles Primat (services pétroliers) et Peugeot (automobile) ainsi que Benjamin de Rotschild (finance) avec 2 à 3 milliards. »
L’article ci-dessous du magazine Bilan [3], datant du 2 décembre 2008, nous donne davantage de détails sur ces « grand(e)s citoyen(ne)s » :
« Sportifs, artistes, entrepreneurs, hommes d’affaires ou retraités : les Français sont nombreux à fuir leur fisc. Un fisc si gourmand qu’il inciterait chaque jour un contribuable à se réfugier sous d’autres cieux. Parmi les destinations les plus prisées, la Suisse.
Notre palmarès des 300 plus riches recense d’ailleurs 32 exilés français, dont 10 milliardaires, pour un patrimoine total de 47,7 milliards de francs, en baisse de 4,5 milliards par rapport à 2007 en raison de la crise financière. Ils pèsent ainsi environ 10 % de la fortune globale de notre classement. Et cette liste est loin d’être exhaustive car leur recensement n’est guère aisé. S’installant en toute discrétion, il n’est pas facile de retrouver leurs traces.
Parmi les découvertes de cette année, Eric Guerlain. Annoncé comme résident à Londres par différents médias, il est en réalité domicilié à Gstaad, faisant ainsi le même choix que Johnny Hallyday. La maison Guerlain, le plus ancien parfumeur français, vient de célébrer ses 180 ans. Propriété familiale, la société a été acquise en 1994 par le géant du luxe LVMH. Quelques 25 héritiers du fondateur touchent alors le jackpot, certains en cash, d’autres sous forme d’actions de la société holding Christian Dior. Cette dernière contrôle 100 % de la maison Dior Couture et 42,5 % de l’empire du luxe LVMH. Aujourd’hui, l’ensemble de la dynastie Guerlain détiendrait environ 10 % du capital de la holding. Agé de 68ans, Eric Guerlain est vice-président du conseil d’administration du groupe Christian Dior.
Son compatriote Paul Dubrulea choisi de s’installer à Genève pour sa retraite active. En 1967, il a fondé Accor, qui est devenu le premier groupe européen d’hôtellerie avec des enseignes comme Sofitel, Mercure, All seasons, Ibis, Etap Hotel et Formule 1. Grand amateur d’art, de cigares et de vélo, il détient 1,3 % du capital d’Accor.
Le bout du lac Léman est aussi le refuge, depuis plusieurs années, de certains membres de la famille Ducros. Cette entreprise est devenue célèbre auprès du grand public grâce à son message publicitaire : « A quoi ça sert que Ducros se décarcasse ? ». En 1992, la société a été cédée à Eridania-Beghin-Say. Tenu secret, le prix de vente est estimé à plus de 200 millions d’euros. Un montant jamais confirmé.
De nombreux patrons ont franchi le Jura après avoir vendu leur entreprise pour échapper à la voracité du Trésor public. Certains bénéficient du fameux forfait fiscal helvétique tout en continuant de gérer leurs affaires depuis la Suisse. La colonie française compte des grands noms de l’industrie comme Eric Peugeot, Jean Taittinger (champagne), Benjamin de Rothschild (finance), Gérard Wertheimer (Chanel), Philippe Hersant (presse), Michel Reybier (ex-Cochonou et Justin Bridou),Claude Berda (AB Group) ou encore les familles Bich (groupe Bic), Lescure (société Seb) ou Defforey (Carrefour).
La Confédération est aussi un havre de paix pour les champions automobiles. Alain Prost, Jean Alesi, Patrick Tambay, Sébastien Bourdais, Frank Montagny, Stéphane Peterhansel et Sébastien Loeb ont déposé leurs papiers en Suisse romande. Tout comme les virtuoses Lewis Hamilton, Felipe Massaou encore Fernando Alonso.
Un choix que partagent des grands noms du tennis, à l’instar de Jo-Wilfried Tsonga, Paul-Henri Mathieu, Arnaud Clément, Gaël Monfils, Richard Gasquet ou encore Guy Forget et Arnaud Boetsch. Ce dernier, établi à Genève depuis 1991, avouait à l’époque avoir économisé 45 % d’impôt en s’établissant en Suisse. Côté féminin, on note Amélie Mauresmo et Marion Bartoli. À cette liste quasiment interminable, il est également possible d’y ajouter les skieurs Antoine Dénériaz et Jean-Claude Killy ainsi que le cycliste Christophe Moreau.
Fisc et qualité de vie rare
Le monde du spectacle n’est pas en reste, avec Charles Aznavour, Patricia Kaas, Alain Delon ou encore Marie Laforêt. Ces deux derniers ont même opté pour la nationalité helvétique. Ils côtoient quelques riches héritières, à l’image de Corinne Bouygues, Caroline Arpels (Van Cleef & Arpels) et Michèle Bleu-stein-Blanchet, la fille du fondateur de Publicis.
Pour les uns et les autres, le choix de la Suisse ne s’explique pas seulement par des raisons fiscales, mais aussi par la possibilité d’y trouver une qualité de vie très rare. Pas de fans ou de paparazzi devant leurs portes, un cadre de vie agréable, ainsi que des écoles réputées. Sans oublier le fameux secret bancaire.
Mais pas besoin d’être une célébrité ou de gagner des millions d’euros par an pour se décider à franchir le pas. Selon un rapport du Sénat publié l’an dernier, 368 personnes soumises à l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ont quitté la France en 2003, soit un par jour, week-end compris. En 2005, ils étaient 649, soit le double. Signe que ce phénomène qui, il y a quelques années, touchait surtout les grandes fortunes, concerne aujourd’hui une frange plus large de la population. Après les Français riches et célèbres, les cadres supérieurs sont maintenant séduits par les rives suisses du lac Léman. »
« Tous ces grands dinosaures - vedettes de cinéma, du sport et du jeu, quelques princes dorés ou féodaux internationaux - qui défraient la chronique des magazines et de la T.V., c’est toujours leur vie par excès, et la virtualité de monstreuses dépenses qui est exaltée en eux. Leur qualité surhumaine, c’est leur parfum de potlatch. Ainsi remplissent-ils une fonction sociale bien précise : celle de la dépense somptuaire, inutile, démesurée. Ils remplissent cette fonction par procuration, pour tout le corps social, tels les rois, les héros, les prêtres ou les grands parvenus des époques antérieures. (...). » Jean Baudrillard [4]