"Nicolas Sarkozy délaisse Marianne pour Marie". Par Grégory Marin

, par  J.G.
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"Laïcité. En déplacement hier au Vatican, le président de la République a abandonné toute réserve, plaçant sa condition de catholique au-dessus de celle de chef d’un État laïque.

Nicolas Sarkozy s’est complaisamment prêté, hier, à la fastueuse visite du Vatican, au cours de laquelle il a été fait « unique chanoine honoraire » de la basilique de Saint-Jean de Latran. Une nomination honorifique à laquelle tous les chefs de l’État français peuvent prétendre, et dont la tradition remonte à Henri IV : après s’être converti au catholicisme en 1593, il a reçu ce titre en 1604. La comparaison s’arrête là. Le « bon roi Henri », à qui l’on prête la citation : « Je veux qu’il n’y ait si pauvre paysan en mon royaume qu’il n’ait tous les dimanches sa poule au pot », n’ayant que peu à voir avec un « président du pouvoir d’achat » qui ne peut promettre à tous ses compatriotes, dans la France de 2007, autrement plus riche, de manger à leur faim…

La question spirituelle

« C’est très émouvant d’être reçu par vous, Très Saint-Père », a murmuré Nicolas Sarkozy en approchant Benoît XVI. Geste de soumission du président d’un État laïque envers le chef d’un État religieux ou attitude déférente d’un croyant envers le chef suprême de l’église catholique romaine à laquelle il appartient ? L’entourage de Nicolas Sarkozy cultive le doute. Ce voyage était « l’occasion pour lui de redire son respect et son attachement », a déclaré David Martinon, porte-parole de l’Élysée, « à la question spirituelle, puisqu’il a toujours considéré qu’elle était au coeur de la vie de nos concitoyens ». Cette question, Nicolas Sarkozy l’a donc définitivement tranchée, se signant lors des cérémonies religieuses, au mépris des traditions républicaines. Hier, le président « bling-bling », accompagné du « comique » Jean-Marie Bigard, est allé jusqu’à entonner le Notre Père lors de la cérémonie à Saint-Jean de Latran. Jean-Claude Gaudin, placé au deuxième rang, a continué à mâcher consciencieusement son chewing-gum, insensible à l’émotion qui faisait pencher la tête du chef de l’État, adoptant la posture inspirée d’un enfant de choeur. Quelques minutes auparavant, n’avait-il pas rappelé - c’est une constante - ses « origines catholiques » et les racines chrétiennes de la France, « sources majeures de la civilisation » ?« Nous avons besoin de la contribution de l’Église catholique comme des autres courants religieux et spirituels pour éclairer nos choix et construire notre avenir », a déclaré Nicolas Sarkozy dans son discours.

Sarkozy n’a pas fini d’effacer complètement la séparation de l’Eglise et de l’Etat

Par ce déplacement au Vatican, Nicolas Sarkozy préparait activement la venue du pape en France, à l’automne prochain, à Lourdes, pour la célébration du cent cinquantenaire des apparitions de la Vierge à Bernadette Soubirous. Le représentant du pouvoir temporel en France n’a pas fini d’effacer complètement la séparation de l’église et de l’État, consacrée par la loi de 1905. Le cadeau qu’il a reçu, symbole de sa charge de chanoine, tombe à pic : un calice de vermeil pour faire boire aux Français, jusqu’à la lie, son étrange conception de la laïcité."

Article de Grégory Marin dans le journal L’Humanité, édition du vendredi 21 décembre 2007.. L’intégralité du discours de Sarkozy :

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